Terres d'Evangile / Vie publique /Le repas chez le pharisien

 
 
 La pècheresse pardonnée
Le Christ refuse la proportion que nous établissons entre la reconnaissance sociale et la dignité de chaque homme, en effet , nous traitons spontanément avec des égards ceux qui nous ressemblent et nous attendrions que Dieu fasse de même. Or, en acceptant l’hommage de la prostituée, Jésus choque son hôte qui se croyait en règle avec la loi. Au delà du premier geste d’accueil, il justifie cette femme en proportionnant son salut à la preuve d’amour qu’elle vient de donner.
 

Citations :Père Carré
Grégoire le Grand, VIe siècle
Grégoire de Naziance, IVe siècle
Ambroise de Milan, IVe siècle


 
Père Carré
“Chaque jour, je commence”, Le pouvoir du mal, Bernard Bro, Cerf, Paris, 1976

“L’infinie miséricorde de notre Sauveur ne refuse pas maintenant une place dans son Corps mystique à ceux auxquels il ne la refusa pas autrefois à son banquet”: cette affirmation de Pie XII, pourquoi l’a-t-on si longtemps ignorée? Et pourquoi ne répète-t-on point partout les paroles de Paul VI: “Celui qui entre dans l’Eglise entre dans une atmosphère d’amour. Que personne ne dise: Je suis ici un étranger. Mais que chacun dise: Je suis ici chez moi. Si je suis dans l’Eglise, je suis dans la charité. Ici, je suis aimé, parce que je suis attendu, accueilli, respecté, instruit entouré de soins, préparé à cette rencontre inestimable: la rencontre avec le Christ”? Un principe est ainsi posé, dont les conséquences sont incalculables. Qui, désormais, pourrait légitimement classer certains de ses frères de bonne volonté parmi les “en dehors”? On est chez soi, ou on n’y est pas, “Des gestes officiels ont déjà été faits. Paul VI l’a déclaré courageusement: “Avec le Concile Vatican Il se trouve définitivement révolu le temps où certains canonistes refusaient de considérer l’aspect théologique des disciplines qu’ils étudiaient ou des lois qu’ils appliquaient... L’Esprit Saint ne peut se contredire lui-même... L’Eglise du droit et l’Eglise de la charité sont une seule réalité.” Mais que l’ordre juridique soit au service de l’ordre spirituel, il faut que la législation elle-même le prouve. Et là où la législation ne peut codifier, que du moins les évêques se prononcent qu’ils nous indiquent comment agir, quelles thérapeutiques envisager, et puisqu’il n’y a pas de péchés irrémissibles, qu’ils nous disent clairement comment aider à se sauver, au sein de nos communautés chrétiennes - et pas en dehors d’elles -, les “publicains” et les “prostituées”. Des modifications profondes ont eu lieu en matière de liturgie, d’ascèse, de relations avec les protestants et les orthodoxes. Dans le domaine dont je parle et où il faudrait que l’amour - au service de la foi - puisse sans cesse inventer, resterons-nous plus longtemps paralysés?
“S’étant approché d’une des fenêtres de son bureau-bibliothèque, Jean XXIII me montra la foule qui traversait la place Saint-Pierre: “Voyez tous ces gens. Qui sont-ils?... Il faut essayer de les comprendre... En tout cas ne confondez jamais les hommes avec leurs erreurs.”
 


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Grégoire le Grand, VIe siècle
Homélie 33

Cependant, le pharisien, voyant cette femme, la méprise, et il reprend non-seulement la pécheresse qui était venue, mais encore le Seigneur qui rayait reçue. D’où il suit: “Ce que voyant, le pharisien qui rayait invité dit en lui-même: S’il était prophète il saurait quelle est cette femme qui le touche.” Voilà ce pharisien vraiment superbe en lui-même et faussement juste, qui reprend l’infirme de son infirmité et le médecin de son secours. Sans doute, si cette femme fût venue aux pieds du pharisien, il l’eût chassée avec mépris, car il se serait cru souillé du péché d’autrui, parce qu’il n’était pas rempli de la véritable justice. C’est ainsi que plusieurs de ceux qui sont chargés du ministère sacerdotal, parce qu’ils font à l’extérieur quelques légers actes de justice, méprisent ceux qui leur sont soumis et dédaignent tous les pécheurs qui sont dans le peuple. Cependant, nous devons, en considérant tous les pécheurs, nous humilier d’abord nousmêmes de leur malheur, parce que nous sommes peut-être tombés dans des fautes semblables, ou nous pouvons y tomber. Il faut aussi distinguer avec soin entre leurs vices, que nous devons juger, et leur personne à laquelle nous devons compatir; car, si le pécheur doit être puni, le prochain doit être nourri. De plus, quand le prochain. châtie déjà lui-même, par la pénitence, ce qu’il a fait, alors il n’est plus pécheur, parce qu’il punit en lui-même ce que la justice divine condamne. Ce médecin était donc entre deux malades; l’un conservait le sens dans lia fièvre, l’autre avait perdu le sens de son âme; celle-ci pleurait ses fautes, le pharisien, au contraire, fier de sa fausse justice, exagérait la force de sa santé.
 


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Grégoire de Naziance, IVe siècle
Sermon 38, 13

L’homme fut d’abord corrigé de plusieurs manières à cause des nombreux péchés que la racine du mal avait fait germer; pour différentes causes et à différ ents moments: parole, loi, prophètes, bienfaits, menaces, coups, eaux, incendies, guerres, victoires, défaites, signes venus du ciel, signes venus de l’air, de la terre, de la mer, changements inattendus d’hommes, de villes, de nations, tout cela visait à extirper le mal. A la fin l’homme a besoin d’un remède plus énergique pour des maladies plus redoutables: meurtres réciproques, adultères, parjures, fureurs homosexuelles, et le dernier et le premier de tous les maux: les idolâtries, c’est-à-dire le transfert de l’adoration du créateur aux créatures. Comme cela demandait un plus grand secours, un plus grand secours aussi est accordé: c’était le Verbe de Dieu lui-même, celui qui est antérieur aux siècles, l’invisible, l’insaisissable, l’incorporel, celui qui est le Principe issu du Principe, la lumière née de la lumière, la source de la vie et de l’immortalité, l’empreinte du Modèle, le sceau immuable, l’image, exacte, la définition et l’explication du Père. Il vient vers sa propre image, il porte une chair à cause de la chair, il se mêle à une âme spirituelle à cause de mon âme, purifiant le semblable par le semblable; et il devient homme en tout, excepté le péché’: il est conçu par la Vierge qui a été préalablement purifiée par l’Esprit dans son âme et dans sa chair, car il fallait à la fois que la génération fût à l’honneur et que la virginité y fût plus encore; il s’avance, Dieu avec ce qu’il a assumé, être unique formé des deux contraires: chair et Esprit, l’un a divinisé, l’autre a été divinisée. Ô mélange nouveau! Ô déconcertante fusion! «Celui qui est” devient, celui qui est incréé est créé, celui que rien ne contient est contenu par l’intermédiaire d’une âme spirituelle qui tient le milieu entre la divinité et l’épaisseur de la chair. Celui qui enrichit’ subit la pauvreté’; il subit cette pauvreté: ma chair, pour que j’aie cette richesse: sa divinité. Celui qui est la plénitude’ se vide’: il se vide de sa gloire pour un peu de temps, afin que moi, je participe à sa plénitude. Quelle est la richesse de sa bonté? Quel est ce mystère qui m’enveloppe? J’ai participé à l’image (divine) et je ne l’ai pas gardée; il participe à ma chair pour, sauver l’image et immortaliser la chair; il instaure avec nous une seconde communauté, bien plus extraordinaire que la première: il nous avait donné part à ce qui est supérieur, maintenant il participe à ce qui est inférieur; cet état est plus digne de Dieu que le premier, cet état, pour ceux qui savent comprendre, est plus élevé.
 


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Ambroise de Milan, IVe siècle
Traité sur l’Evangile de S. Luc 6, 35

Grâce donc à cette femme, nous comprenons ce mot de l’Apôtre : “le péché a surabondé, pour que surabondât la grâce”, Rm 5,20. Car si chez cette femme le péché n’avait pas surabondé, la grâce n’aurait pas surabondé : elle a reconnu son péché et attiré la grâce. Et c’est pourquoi la Loi est nécessaire : c’est par la Loi que je reconnais mon péché; s’il n’y avait pas eu de Loi, le péché resterait caché ; reconnaissant mon péché, je demande pardon. Par la Loi donc, je reconnais les espèces de péché , le grief de ma prévarication; je cours à la pénitence, j’obtiens la grâce. La Loi procure donc le bien, puisqu’elle envoie à la grâce.
 


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  Documents associés : 
Lieu : 
Galilée
Texte de l'Evangile : 
Luc 7, 36-50
Clés de Lecture : 
La pècheresse pardonnée
Symboles : 
Les larmes
Expérience humaine : 
Le passé irréparable
Accomplissement des Ecritures : 
Dieu recrée le pécheur